Décès en Grèce de Mgr Anastasios, archevêque de l'Eglise orthodoxe en Albanie
L'archevêque de l'Eglise orthodoxe en Albanie, Mgr Anastasios, figure importante du clergé orthodoxe à Tirana pendant plus de trente ans, est décédé samedi à l'âge de 95 ans, a annoncé l'hôpital d'Athènes où il avait été admis.
De nationalité grecque, Mgr Anastasios était hospitalisé depuis début janvier à Athènes, où il avait été transféré de Tirana en raison de complications après avoir contracté un virus.
Il est mort "d'une défaillance de plusieurs organes", selon un communiqué de l'hôpital Evangelismos d'Athènes.
L'Eglise orthodoxe de Tirana a exprimé "sa grande douleur" après le décès de son archevêque.
"L'Albanie a perdu l'archevêque de Tirana, Durrës et de toute l'Albanie, le professeur Anastasios, chef spirituel et figure éminente de l'Église orthodoxe autocéphale d'Albanie", a affirmé dans son message de condoléances le président albanais Bajram Begaj.
Il a loué "la sagesse, le dévouement et l'amour pour les gens" de Mgr Anastasios, qui "avait contribué au renforcement et à la création d'un nouveau chemin pour la foi orthodoxe albanaise".
Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis a pour sa part qualifié la contribution du dignitaire à l'orthodoxie d'"inestimable".
"Son empreinte reste indélébile": Mgr Anastasios "émettra toujours des messages de vie et de coexistence pacifique", a-t-il ajouté.
Le Parlement grec a observé une minute de silence en hommage à ce dignitaire "emblématique", selon son président Nikitas Kaklamanis.
Son corps sera exposé à la cathédrale d'Athènes dimanche et une cérémonie religieuse aura lieu avant son transport lundi à Tirana, où ses funérailles auront lieu, a précisé samedi après-midi l'Eglise orthodoxe de Grèce, en coordination avec l'Eglise en Albanie.
Selon certains médias grecs, les obsèques devraient être célébrées jeudi.
- Réformateur -
Né en 1929 au Pirée, le grand port d'Athènes, Anastasios Yannoulatos (son nom civil), était connu pour son charisme et ses manières affables.
Docteur en théologie ayant enseigné à l'Université d'Athènes et de Marbourg (Allemagne), Anastasios a voyagé en Afrique et en Asie, laissant une riche œuvre philanthropique.
En trois décennies, le dignitaire a réussi à ressusciter l'Eglise orthodoxe en Albanie mise à mal par le régime auto-déclaré "athée" du dictateur communiste Enver Hodja.
Il était parvenu à dissiper les doutes initiaux des Albanais à son encontre, pour finalement leur inspirer une réelle admiration et sympathie.
Les chrétiens, catholiques et orthodoxes représentent 25% de la population en Albanie, un pays à majorité musulmane.
Dans nombre des interviews qu'il avait accordées, Anastasios se plaisait à montrer l'empreinte qu'une balle tirée par un sniper avait laissée dans la fenêtre de son bureau en 1997, une année de tensions politiques et sociales en Albanie.
"Je garde cette fenêtre pour me souvenir que la vie ne tient qu'à un fil. Nous ne devons pas la gâcher en un seul jour", déclarait-il dans un entretien en 2015 au site oikoumene.org du Conseil œcuménique des Eglises.
Outre l'édification d'églises, dont l'immense cathédrale orthodoxe à Tirana, et la réorganisation de la communauté orthodoxe, il se focalisait sur des opérations de promotion de la paix, de sauvetage, en lien avec la santé, ou encore de protection de l'environnement.
- Tolérance -
En 2017, l'ancien président albanais Ilir Meta lui avait accordé la nationalité albanaise.
"Depuis le jour où je suis devenu archevêque et où je suis arrivé en Albanie, je me suis senti comme un citoyen albanais qui travaille et a une grande responsabilité dans ce pays", s'était alors réjoui Anastasios.
En 1991, il était venu en aide à la communauté orthodoxe en Albanie, qui avait beaucoup souffert sous le régime communiste qui s'était autoproclamé en 1967 "le premier Etat athée du monde".
Sous la dictature d'Enver Hodja (1945-1985), sept archevêques, 111 prêtres et huit religieuses de différentes confessions ont été emprisonnés ou exécutés.
Œuvrant à la reconnaissance de l'Eglise orthodoxe depuis 1992, Anastasios avait prêché pour la tolérance religieuse dans ce pays frontalier de la Grèce.
Pendant les situations de crise, il avait apporté son soutien à la communauté orthodoxe mais aussi au reste de la population albanaise, en ouvrant notamment les églises aux personnes sans abri après le tremblement de terre de Durrës, en 2019.
Fidèle à son pays d'origine, Anastasios se voulait aussi le porte-parole de la minorité grecque d'Albanie (23.485 personnes sur une population totale de 2,4 millions), présente surtout dans le sud du pays.
P.Walsh--IP